La Seine n’est pas à vendre
Pour changer la manière de faire la ville : mettre la Seine au cœur de la transformation d’Ivry confluences
Nous partageons ici une tribune rédigée par l’association « La Seine n’est pas à vendre »
L’aménagement de la confluence Seine-Marne est, à l’échelle métropolitaine, un enjeu majeur.
Les perspectives ouvertes par les corridors fluviaux, la symbolique de leur rencontre, la puissance de leur réalité naturelle, leur rôle dans les différents types de flux, la charge historique faisant converger Champagne, Brie et Beauce à Paris en font un site fluvial d’une très grande originalité.
A propos
L’association « La Seine n’est pas à vendre » estime indispensable de garder l’entière maîtrise publique sur les aménagements des rives et des ponts des fleuves, dans une perspective à long terme intégrant le « grand paysage » et conservant le statut public des rives basses et hautes.
https://www.laseinenestpasavendre.com/
Pourtant, les opérations de grande ampleur qui bordent le fleuve – ZAC Confluences de 145 ha à Ivry et réaménagement de Chinagora à Alfortville – ne révèlent pas ce potentiel ou ne le font qu’à la marge. A aucun moment n’apparaît vraiment la volonté de « désincarcérer » la Seine et la Marne.
Ainsi, à Ivry confluences, si le plan de la ZAC a la bonne idée de détourner la circulation automobile des bords de la Seine afin de les réserver à des circulations douces et à des aménagements paysagers, il semble que cet aménagement ne concerne qu’un mince bandeau et soit limité à la partie sud de la ZAC.
Par ailleurs, le parc de 4,5 ha situé à la confluence ouvre une transversale bienvenue vers l’intérieur de la ZAC, mais pourquoi l’avoir amputé de 3 ha en augmentant l’emprise des îlots bâtis (3L, 3N à 3Q) et que fait l’usine de la CPCU en plein milieu du parc ? La percée visuelle vers la Seine, prévue au travers du terrain Total entre les deux grandes halles de bord de fleuve, va-t-elle se rétrécir de la même manière ? Enfin est-ce la bonne méthode de faire des réunions avec les habitants principalement sur des « micro-quartiers » alors que c’est le projet global qu’il faut réinterroger ?
Nous avons conscience qu’il s’agit d’une opération difficile et complexe, mais pourquoi ne pas profiter du changement de maîtrise d’œuvre urbaine (MOE) pour opérer un changement radical de la vision des rapports de la ZAC au fleuve afin de l’utiliser comme récit, conjointement au récit patrimonial industriel et ouvrier, permettant de faire un nouvel urbanisme socio-écologique et citoyen ?
Il est vrai que les problèmes abondent. La mutation de terrains industriels souvent pollués et situés essentiellement en zone inondables est un énorme défi que la ville ne peut relever qu’avec le concours de l’Etat, de la Région et du Grand Paris. La renaturalisation du corridor fluvial et la création d’ouvertures sur le fleuve impliquent de nouvelles discussions avec HAROPA et Voies Navigables de France (VNF). La conception d’un nouveau plan de la ZAC Ivry Confluences, incorporant les impératifs liés au « drame » écologique et prenant mieux en compte la Seine, ne peut se faire qu’en mobilisant de nouveaux savoirs et par la dynamisation d’une démocratie délibérative avec les habitants de la ZAC et les associations locales, telles qu’URBANICC et LAPIC.
Plus généralement, il faut s’interroger sur l’instauration d’un moratoire sur les opérations, d’une durée à déterminer, afin d’avoir un temps pour la réflexion et le débat.
Muriel Pagès et Marcel Rousset-Deschamps
(association La Seine n’est pas à vendre)