Fabriquer la ville : 1/ Anticiper les situations à risque

Récemment une petite trentaine de riverains de l’impasse Prudhon se sont adressés aux élus concernés afin de les sensibiliser aux troubles de voisinage qu’ils subissent du fait l’activité de ferraillage particulièrement bruyante dans l’impasse. Cette question a été soulevée de façon récurrente en 2019 dans les Ateliers du jeudi, la Ville assurant qu’une relocalisation de l’activité était à l’étude. Mais la résolution tarde à se mettre en place.

Vue sur l’impasse Prudhon. Premier plan, à gauche : la maison et la cour des ferrailleurs ; avec façade rouge : le studio de l’artiste Miguel Chevalier. Second plan, à gauche : l’Usine des Eaux ; au centre, avec façade inclinée : résidence pour étudiants et chercheurs. Troisième plan : résidence Madiba.

L’association Lapic ainsi que le collectif Urbanicc ont souhaité appuyer de leur signature le courrier des riverains.

Pour Urbanicc, ce problème est significatif d’un défaut d’anticipation des complexités de la fabrication d’une ville.

Ce sont, dans ce cas précis, les habitants qui portent à la connaissance de leurs édiles une situation de tension. Ne serait-il pas raisonnable de créer  en amont, avant de laisser des dizaines voire des centaines de familles s’installer dans un quartier qui sort de terre, les conditions les plus favorables possible au vivre-ensemble ?

Lorsqu’une situation telle que celle-ci est bien gérée par les pouvoirs publics, alors la vie quotidienne peut se déployer dans une relative bienveillance partagée. En effet il s’agit, au cœur de la densité urbaine, non seulement de favoriser la cohabitation mais d’établir un climat paisible, de veiller aux risques de dérive d’usages, de conflits d’usages et/ou de voisinage.

Les situations à risques, dont on peut observer les prémices à Ivry-Port, peuvent se répertorier :

  • Toute installation dans un habitat collectif ou dense, si elle n’est pas accompagnée par les services sociaux, de familles au mode d’habiter spécifique ou en grande difficulté ;
  • Les opérations de densification qui dégradent les conditions de vie des habitants en place ;
  • Les zones d’habitations traversées par des flux de véhicules lourds desservant des plateformes d’activités ;
  • Aires de jeux et de détente dans une proximité trop bruyante avec les logements ;
  • Les espaces propices à des trafics ou des agressions parce que mal éclairés ou situés à l’écart ;
  • L’indétermination du statut de certains autres espaces (qui en sont les propriétaires ? quel en est l’usage reconnu?), ce qui entraîne le déficit de leur gestion.

L’objectif de la Ville – que partage Urbanicc – est de faire d’Ivry-Port un quartier mixte, à l’échelle des îlots, au plan tant de la population que des fonctions, selon le « droit à  la ville pour tous ». Cette ambition implique que soient mobilisés les moyens nécessaires à la coexistence harmonieuse entre les logements et toute une palette d’activités et d’équipements, d’une part ; entre des familles aux habitudes de vie diverses, d’autre part ; enfin, entre les habitants «historiques» et les nouveaux venus. Ces moyens relèvent à la fois de l’organisation urbanistique et des choix architecturaux, des politiques d’accompagnement social et de gestion urbaine de proximité. Ils impliquent tous les acteurs de la ville : municipalité, aménageur, État, Conseil départemental, associations ayant des missions d’intérêt général.    

Chaque famille attend de la collectivité locale, gestionnaire du fonctionnement de la ville, qu’elle lui procure les conditions où elle mènera sa vie paisiblement au côté de familles inconnues, avec qui il est chaque jour question de faire société. Le rôle de toute municipalité est essentiel et les citoyens ne peuvent accepter qu’une partie d’entre eux soit régulièrement renvoyés à leur supposée intolérance à autrui.

Les plaintes récurrentes sont légion, et toutes légitimes : un jour le bruit, un autre jour les odeurs, puis la saleté, la circulation, etc.  Chacune d’elles émane d’un public circonscrit et vise chaque fois une activité ou un public différents.

Il est important que la collectivité locale aille au contact des habitants, de leur vie quotidienne – sur le mode des Mardis du maire – pour les écouter et leur proposer des solutions. 

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