Entretien avec Maxime Lefranc – agence ACLAA

La jeune agence d’architectes-urbanistes ACLAA fait partie, avec uapS, BASE, What Time Is I.T. et Zefco, du groupement de maîtrise d’œuvre chargé de la ZAC Ivry Confluences.

Lors de la réunion publique en ligne du 30 novembre dernier, le groupement a présenté les nouvelles orientations de la ZAC. Par la suite URBANICC a souhaité approfondir certains des sujets avec le cofondateur d’ACLAA, Maxime Lefranc. Nous l’avons donc interrogé sur les principes et les objectifs de la nouvelle vision urbaine, sur le concept d’îlots organisés en « ivrynages », sur la configuration du futur parc des Confluences, et sur les espaces publics de proximité.

Propos recueillis par URBANICC le 5 janvier 2021.

En guise de présentation, pourriez-vous nous parler des projets sur lesquels ACLAA travaille ou a travaillé et des enseignements que l’agence en a tirés, dont Ivry Confluences pourrait bénéficier ?

Maxime Lefranc – agence ACLAA

ACLAA est une jeune agence d’architecture et d’urbanisme. Elle a été fondée en 2016 par Pierre-Paul Cursolle et moi-même. Nous avons fait nos études à l’école d’architecture de Grenoble. Nous nous sommes orientés très tôt dans ce cursus vers les questions urbaines et territoriales.

En 2016 nous avons eu le souhait de pousser plus loin nos désirs de projets urbains et architecturaux, ce qui a motivé la création d’ACLAA avec deux projets : à Conakry un projet de planification territoriale, et à Paris, un suivi de chantier pour un bâtiment-pont dans le XIIIe, derrière la BNF.

Pendant 4 ans nous avons développé l’agence avec l’intention d’être toujours entre ces 2 échelles, architecturale et urbaine.

Autres projets d’urbanisme

Nous avons actuellement davantage de projets urbains en cours que de projets architecturaux. La ZAC Ivry Confluences est notre plus gros projet, mais nous travaillons également sur d’autres territoires.

Nous avons récemment été désignés lauréats d’un projet à Saint-Thibault-des-Vignes (en Seine-et-Marne, proche de Marne-la-Vallée) où l’enjeu est d’assurer le développement du centre bourg, historique et villageois, par un projet essentiellement résidentiel sous forme de lanières boisées.

Nous travaillons également avec la ville de Paris sur une étude urbaine pour le devenir de Cap 18, une des dernières zones d’activité située dans Paris, au niveau de la porte d’Aubervilliers ; où se pose particulièrement la question du maintien de la ville productive et de son intégration dans le développement du quartier à vocation plus mixte.

Enfin, suite au concours Europan 16 où nous avons été mentionnés, nous travaillons avec la ville d’Aurillac pour la transformation d’une ancienne friche industrielle située dans le cœur historique de cette ville, avec des enjeux patrimoniaux importants.

Ivry Confluences est le premier grand projet urbain sur lequel nous travaillons mais il vient après les premiers travaux sur la ZAC que nous avons menés pour le compte de la SADEV avec l’agence Bruno Fortier : la réalisation d’un premier plan-guide synthétisant toutes les études menées depuis la création de la ZAC, regroupant les grands enjeux de ce projet, formalisant les orientations stratégiques et intégrant les conclusions des assises de la ville. Nous avons accompagné ce plan d’un livre 2 qui formule des critiques positives et négatives afin de dégager des orientations pour la suite.

Forts de ce document, de notre connaissance du territoire et de ses acteurs, nous avons proposé à Anne Mie Depuydt de répondre ensemble à l’appel de candidature lancé pour le renouvellement de l’équipe de maîtrise d’œuvre urbaine. Nous avions déjà une expérience avec Anne Mie Depuydt à Ivry Confluences (lot de logements 4G). Par ailleurs nous suivions son travail depuis quelque temps.

Pouvez-vous préciser la répartition des missions entre ACLAA et uapS, et votre articulation avec le rôle de coordination de Anne Mie Depuydt ?

Anne Mie Depuydt, avec son agence uapS est mandataire et coordonnatrice du groupement. ACLAA est co-urbaniste. Notre objectif est de travailler le plus possible en étroite collaboration avec tous les membres du groupement (BASE, ZEFCO, uapS et What Time is I.T.).

Ainsi nous avons des points réguliers dans le cadre d’une sorte de comité de conception de façon à avoir une connaissance globale et horizontale du projet.

Cependant Ivry confluences étant un très grand projet qui amène à traiter une multiplicité de questions, il faut à un moment se répartir les tâches.

Nous avons donc établi un tronc commun pour assurer la cohérence du projet (le plan-guide, les cahiers de prescriptions, les faisabilités) et ensuite quand il s’agit de décliner les orientations pour les fiches de lots et les suivi architecturaux, une répartition est organisée entre les 2 agences.

Les échanges sont facilités par le fait que les 2 agences sont à Paris, nous disposons d’une plateforme numérique d’échange et de partage des documents. Nous nous réunissons au moins une fois par semaine.

La nouvelle vision urbaine

Quels sont les points saillants de la nouvelle vision urbaine que vous proposez et les principales évolutions par rapport au projet précédent ? Comment les critiques des habitants ont-elles été prises en compte ?

La stratégie : Ivry POP (Paysage, Original et Productif)

Nous avons produit un ensemble de documents que pour la plupart nous avons remis à la fin de l’année :

  • Le manifeste de la POP city qui donne la vision
  • Les POP actions (les éléments phares du projet présentées sous forme de cartes postale pour susciter l’imaginaire)
  • Le plan POP, sorte de plan masse, document de représentation des éléments structurants du projet, des grandes dynamiques. Il nécessite encore des allers et retours. Il constitue une base-projet qui est amenée à s’enrichir et à évoluer avec les études opérationnelles et de faisabilités, au gré des opportunités et en fonction des modes opératoires retenus.
  • Un ensemble de documents plus opérationnels : tableau des surfaces, un plan de programmation, un plan des espace publics, un plan de phasage qui est en cours de finalisation avec la SADEV

D’abord je voudrais rappeler que le projet était déjà très engagé lorsque la nouvelle équipe de maîtrise d’œuvre est arrivée. Finalement dans les 2 prochaines années ce qui va sortir de terre ce sont des projets conçus par les équipes précédentes. Cette inertie d’un projet urbain peut créer de la confusion chez les habitants.

Les points saillants de notre projet ont été présentés lors de la dernière réunion publique fin novembre. On a pu les vérifier, les concrétiser pour qu’ils soient entérinés :

1/ La question de la Seine

Il reste très peu de lots à bâtir dans le secteur de la Seine, la plupart ayant été conçus et lancés avec l’équipe précédente. La densité va être forte le long de la Seine, avec de hauts immeubles et peu de conservation de l’existant. Aussi notre première action a été de redonner à Ivry l’accès à la Seine en déplaçant les quelques lots qui restaient à concevoir en bord du fleuve vers l’intérieur du quartier. Notre intention en premier lieu a donc été d’agrandir le parc en l’étirant le long de l’eau, de façon à ce qu’il devienne un grand espace public ouvert, à l’échelle métropolitaine, mais aussi à l’échelle locale et reconnectant le quartier et la ville avec son fleuve.

2/ Les Ivrynages

Dans le projet initial, les grandes emprises foncières des anciennes activités industrielles étaient systématiquement découpées en 4-5 îlots de 1 hectare et remaillées par des voiries qui venaient les distribuer. L’une des particularités d’Ivry est que, en raison de son passé industriel et de sa proximité avec Paris, beaucoup de réseaux passent sous les voiries, les trottoirs. Les sous-sols d’Ivry sont envahis de réseaux. Mais ces grandes emprises, qui étaient des propriétés privées, en sont dépourvues. C’est une opportunité pour planter des arbres plus facilement et plus densément. Donc nous voulons conserver ces grandes emprises en les rendant traversables par les piétons et les vélos, mais pas par les voitures, en plantant leur cœur, en y intégrant des micro-polarités de quartier. D’où les ivrynages, réinterprétation des béguinages.

3/ « Learning from Ivry »

Cela fait référence au livre « learning from Las Vegas » de Robert Venturi, Denise Scott Brownet, Steven Iznour qui avaient amené leurs étudiants à Las Vegas pour apprendre de cette ville. A Ivry nous sommes dans un tissu « organique » qui est singulier avec des petits immeubles à côté de grands bâtiments, des immeubles d’habitation jouxtant des équipements d’échelle métropolitaine. Ivry n’a pas de structure unitaire, ce qui est une richesse même si parfois les éléments se juxtaposent sans se tendre la main. Le quartier s’est parfois construit de façon opportuniste sans règles très marquées sur les questions de gabarits, d’alignements, ce qui créé des contrastes, de la mixité programmatique, typologique, morphologique. Notre souhait est de nous en inspirer et de réinterpréter ce tissu existant dans le cadre du projet urbain.

Pour simplifier nous souhaiterions faire de « l’anti ZAC ». Les ZAC bien souvent se développent sur des terrains qui ont été totalement libérés. On vient y redéfinir des îlots selon des dimensions rentables (bâtiments avec des épaisseurs de 15 m pour du logement, 18 m pour du bureau) avec de longues façades. Finalement cela crée des zones urbaines qui vieillissent en même temps et pas toujours très bien.

A Ivry nous visons la diversité : de la hauteur en bord de Seine, une échelle de faubourg à l’ouest du Boulevard Paul Vaillant Couturier et de l’Avenue Jean Jaurès avec ici encore des déclinaisons d’échelle entre le Nord de la Rue Rigaud et le sud vers la rue Ampère où l’on trouve des maisons en bandes mitoyennes. Nous cherchons à éviter les gabarits de rues standard, pour avoir une approche « la plus située » possible : nous pouvons en effet obtenir la densité nécessaire sans faire systématiquement des immeubles hauts, par exemple par des bâtiments bas avec des rues moins larges que prévu. Dans l’ancien projet, de nombreuses voies étaient très larges. Nous voulons plutôt nous appuyer sur le réseau viaire déjà présent et respecter les constructions existantes.

Du point de vue programmatique « le learning from Ivry » conduit à faire une ville où l’on puisse habiter, travailler, se divertir, à retrouver le caractère productif de la Seine amont. Ceci suppose de combiner les différentes fonctions et activités en évitant les grandes plaques monofonctionnelles qui étaient une tendance de l’ancien projet.

Le learning from Ivry c’est également valoriser le patrimoine existant.

Pendant le confinement nous avons fait un travail d’inventaire d’édifices à conserver en partant du travail de la première équipe et en le complétant, par exemple : des immeubles d’habitation dans l’îlot Fauconnière vers la rue Jean-Jacques Rousseau ; sur les rues des Lampes et Gunsbourg, une grande halle métallique qui pourrait trouver une nouvelle destination au sein d’une entreprise ; une autre halle sur l’îlot des abattoirs ; sur la rue Gunsbourg l’immeuble bleu et blanc art déco qui vend de la quincaillerie-plomberie… Notre approche est avant tout « située » et part des conditions du site avant de faire table rase. Ce sont des intentions que l’on porte mais il est difficile de rendre public cet inventaire car il pourra évoluer en fonction des études de faisabilité, des diagnostics techniques à mener.

Les ivrynages

Quelle est la pertinence du concept de béguinage / ivrynage par rapport à l’organisation de la vie sociale à Ivry Port et aux orientations générales de la ZAC ?

Pourquoi le concept d’Ivrynage ?

C’est avant tout la question de l’existence de grands îlots vierges de tout réseau sous-terrain qui nous a amenés à ce concept. Il nous est apparu important de conserver ces grands îlots car les supprimer reviendrait à faire fi de l’histoire et de la mémoire industrielle du quartier qu’ils représentent mais aussi car la spécificité de leur grande taille est une opportunité pour réorganiser la ville de manière intéressante en multipliant et en apaisant les parcours. Il y a peu de voies carrossables nouvelles dans le projet ; il existera plutôt un nouveau réseau de chemins, allées, sentiers piétons et vélos. L’idée des ivrynages c’est de contribuer à l’organisation de ces voies douces.

Nous avons souhaité relier Ivry-Est à Ivry-Ouest, la Seine aux coteaux, par les « allées de Seine » : ces parcours Est/Ouest sont souvent associés à des voiries. Les franchissements de la voie ferrée resteront limités, une passerelle piétons/vélos reliera la rue Gunsbourg à l’hôpital Charles Foix.

A côté des allées de Seine, sont prévues les « traverses du quotidien », axes Nord/Sud qui passeront par des espaces plus apaisés comme le cœur des ivrynages, et relieront différents équipements et espaces publics : écoles, squares, places, terrains de sports, commerces.

Le cœur des ivrynages : Quel sera leur statut ? Comment seront-ils organisés et gérés pour éviter les conflits d’usage ? Comment éviter que leur fermeture ne soit un jour demandée par les riverains ?

Pour l’instant nous avons plutôt imaginé que ces espaces soient de statut public, ouverts. La surface des cœurs des ivrynages sera variable en fonction de la taille des îlots et de leur forme. Il y a 4 principaux ivrynages (ce concept se diffuse par ailleurs dans le quartier à des échelles réduites).

Nous militons pour que ces cœurs d’îlots soient des espaces publics de fraîcheur, ouverts, tout en prévoyant, en termes de faisabilité, qu’ils puissent s’adapter, si besoin. Mais nous voulons créer toutes les chances pour qu’ils soient de statut public. Pour cela il faut être attentif à l’organisation de ces espaces, aux potentiels conflits d’usages, au traitement des rez-de-chaussée, aux limites avec les espaces privatifs et à l’entretien de ces espaces.

Le découpage de chaque îlot en parcelles fixera les limites des espaces publics et s’imposera aux promoteurs.

L’ivrynage est une réinterprétation du béguinage, sans reprendre le concept à l’identique. Le béguinage historique est une parcelle avec un cœur vert et une enceinte périphérique de bâtiments comprenant éventuellement des porches, le cœur étant plutôt privé. Cette figure peut prendre dans notre projet plusieurs formes, avec des cœurs plus ou moins ouverts sur la rue, des épaisseurs de bâtiments plus ou moins marquées.

La diversité programmatique et typologique est très importante : par exemple l’îlot BHV était précédemment affecté à de grands bâtiments de bureaux avec des espaces de connexion entre la Seine et le faubourg qui auraient été sans vie en dehors des heures d’ouverture. Donc nous avons proposé d’y introduire des logements sous différentes formes (immeubles collectifs, maisons de ville, hôtels d’entreprises) avec des usages réversibles dans le temps, et des rez-de-chaussée actifs. Le BHV est notre premier gros challenge.

Les 4 ivrynages

L’Ivrynage «  avenir » :

Avec l’idée d’un espace paysager en longueur; un jardin linéaire qui jouerait le rôle de passage entre la rue Guillou et la rue Lénine et qui distribuait des rez de chaussés actifs, où des entreprises en lien avec l’image, le spectacle et l’audiovisuel pourraient prendre place. Un diagnostic de la structure des halles existantes est nécessaire pour prévoir un passage sous les halles.

Le Cœur de l’Ivrynage BHV

Qui sera un espace public de type square central, dont les usages pourront être en lien avec le nouveau groupe scolaire en construction. Cet îlot et ce square articuleront le Boulevard Paul Vaillant Couturier avec la Seine et le Cours de l’Industrie.

L’îlot Gambetta

Le cœur sera décliné en 2 parties :

– d’une part le TZEN en site propre qui passera au Nord de l’îlot et sera doublé d’une traversée, plantée, organisée autour d’une place qui prolongera le faisceau paysager  entre 4G et 4E jusqu’à la place Gambetta

– d’autre part des cœurs privatifs traversés peut être par une sente qui pourrait être fermée le soir. (nous n’avons pas encore étudié la faisabilité de cet îlot).

L’ivrynage « Lampes » (Axelis+) :

Il est programmé à plus long terme. D’abord il faut trouver une solution pour relocaliser l’entreprise Axelis+. Cette opération va prendre du temps. Le cœur d’îlot sera plutôt un square de quartier. La rue Couderchet rejoindra la rue Ampère comme prévu. 

Les rez-de-chaussée des ivrynages, lieux de vie sociale et de vie active : quelle organisation côté rue, côté cœur d’îlot ? quelle gestion dans le temps ?

La gestion dans le temps est le point crucial. Un projet urbain prend du temps. Les premiers logements sortis de la ZAC sont loin d’être dans un environnement urbain constitué, c’est le cas des îlots autour de l’école Rosalind Franklin. De plus cette ZAC se caractérise par une complexité de la maîtrise foncière qui est constituée d’une multiplicité de parcelles, de propriétés et de baux de natures différentes. Le temps long est donc une donnée essentielle à prendre en compte.

Tout l’enjeu des rez-de-chaussée, c’est de les imaginer le plus réversibles possible.

Comment dans le temps long du projet urbain peut-on concevoir des RDC qui puissent se transformer ? Par exemple, au départ ils pourraient être occupés par du logement, des activités ou des bureaux et demain quand la densité sera suffisante dans les alentours, par du commerce.

Pour l’instant il n’est pas prévu un portage et une gestion spécifique tel qu’ont pu le mettre en place certaine villes comme Nantes ou Paris. Cela serait une piste intéressante. En premier lieu nous voulons créer les conditions pour rendre techniquement réversibles les rez-de-chaussée : accessibilité, autonomie, hauteur sous plafond… Les hauteurs sous plafond seront modulées.

Notre intention est de permettre aux rez-de-chaussée de s’ouvrir côté rue et côté coeur d’îlot. L’idée c’est de les rendre le plus actifs possible. Exemple : un restaurant pourra avoir une entrée côté rue et sa terrasse côté jardin central.

Comment seront recherchées des synergies entre les différents secteurs du quartier et une cohérence urbaine globale? Et notamment comment éviter le risque de décrochage du secteur Sud dit « far west » ?

A partir de son diagnostic anthropologique, Stéphane Juguet a déterminé 4 pétales.

Notre approche urbaine a conduit à découper le territoire plutôt en séquences Nord/Sud :

  • la séquence Seine,
  • la séquence Gambetta (séquence importante car c’est elle qui doit assurer la transition d’échelle, entre les grands immeubles du cours de l’Industrie et le tissu faubourien de Paul Vaillant-Couturier/Jean Jaurès),
  • la séquence faubourg (la plus grande surface),
  • et la séquence la plus resserrée, le long du chemin de fer.

Pour le « Far West » dans la définition de Stéphane Juguet, qui paraissait loin de tout, nous apportons un début de réponse en travaillant les liens Nord/Sud de la séquence faubourg. Sa déconnexion est due en partie à Axelis qui vient couper en deux cette partie Sud de la ZAC. Elle est à l’écart mais elle a un côté charmant avec l’hétérogénéité de son bâti, la présence de maisons et de petits passages. Ses habitants en attente des urbanités doivent en effet trouver le temps long.

Donc premier point de cohérence, la cohérence urbaine, celle des gabarits et des prescriptions urbaines.

Le deuxième point est la cohérence des parcours avec les allées de Seine Est/Ouest et les traversées du quotidien Nord/Sud. Ce maillage dans les 2 directions va créer des continuités et relier les différents points d’intensité dans la ZAC par des parcours le plus souvent possible apaisés.

Le troisième point de synergie ce sont les micro-polarités : comment les habitants peuvent-ils trouver dans un rayon de 15 min les services du quotidien dont ils ont besoin ? (commerces de proximité, services, équipements culturels, scolaires, sportifs…). Deux-trois nouvelles micro-polarités sont envisagées : une autour des abattoirs, une autour de la petite place Ampère et du parvis Blin, une sur l’îlot Avenir. Des éléments patrimoniaux viendront les conforter. L’idée c’est de créer des lieux d’intensité.

Comment sera intégré le projet « Réinventer la Seine » prévu sur l’ancienne usine des Eaux ?

L’interface entre la ZAC et ce projet (hors ZAC) va se jouer principalement sur la continuité de l’une des allées de Seine (rue de l’Éclateur, puis la rue Blin et celle qui se termine sur la Seine par le faisceau paysager entre 4G et la halle Sagep). Donc il y a un enjeu important à ce qu’il y ait une traversée publique sur l’emprise de l’ancienne usine des Eaux au nord des bassins. Le projet a du mal à sortir et a dû évoluer. Il était prévu un hôtel, de l’habitat dans des immeubles en terre…

Le parc des Confluences

Le parc de bord de Seine paraît relativement mité, si bien que l’appellation « parc » paraît inappropriée pour les habitants : quelle sera réellement la surface qui relèvera du domaine public ? Sera-t-il totalement ouvert ?

Notre simulation de la surface du parc sans comptabiliser les espaces de cœur d’îlot 4E et 4G aboutit à un peu plus de 10 ha. Cette terminologie de parc est compliquée si on se réfère aux parcs parisiens de type Buttes-Chaumont avec des grilles périphériques qui en font un espace clos. La référence serait plutôt le parc de la Villette, qui intègre d’ailleurs en son sein de nombreux bâtiments aux programmation diverses : la Cité des Sciences, la Grande Halle… Le parc des Confluences sera ouvert, comprendra les deux grandes halles de bord de Seine qui pourront accueillir des équipements. Il sera traversé par la voie Colonel Fabien et mité par le Siap et le concessionnaire BMW qui sont hors ZAC et sur lesquels nous n’avons pas de prise. Peut-être un jour muteront-ils. Il faudra aménager des traversées de ces espaces.

Parc des Confluences – présentation du 30/11/2020 – source SADEV94

Comme La Villette, le parc sera séquencé.

Nous n’avons pas pu gagner davantage d’espace pour le parc compte tenu de tout ce qui était engagé. Il faudrait peut-être plutôt utiliser le terme de berge alluviale élargie que celui de parc : le projet redonne de l’épaisseur au fleuve (entre 100m et 200m). Les halles vont être absorbées, faire partie de l’aménagement du parc. Au total, en additionnant toutes les surfaces qui contribueront à ce paysage nous approcherons les 12 ha.

Quelle relation directe avec la Seine ? La ZAC s’arrête au niveau de la murette anti-crue. Il faudrait entrer en discussion avec VNF, et Port de Paris, pour la question de l’accès aux berges. Peut-être pourrons-nous imaginer une promenade au-dessus de l’eau ? Pour l’instant nous ne sommes pas à ce stade de discussions.

Pour ce qui est du phasage du parc, 2 parties devraient démarrer dans un premier temps :

  • le secteur des anciens lots 3P/3Q, le long de la rue Marcel Sallnave dont la SADEV a la maîtrise foncière et sur lesquels on peut imaginer les premières préfigurations et aménagements.
  • 2 autres espaces pourront être aménagés : autour de l’ancienne halle Mazet et/ou entre la halle de la Ville de Paris et la Halle Sagep le parvis de la halle Sagep, qui a accueilli la guinguette lors du dernier été à Ivry, et qui constituera à terme l’entrée sud du parc.
  • Ces différents espaces seront reliés par le quai Henri Pourchasse, qui sera délesté de circulation automobile une fois que la partie sud du cours de l’Industrie sera mise en service.

Environnement et qualité de vie

L’activité de logistique se développe fortement à Ivry Port, avec ses camions et camionnettes. Comment allez-vous limiter les impacts négatifs sur la qualité de vie des habitants ?

Une étude sur les flux de circulation est en cours. Elle sera précieuse dans le cadre des études préliminaires sur les espaces publics qui vont bientôt démarrer. Sur la question des nuisances des camions et camionnettes nous travaillons avec l’Etablissement public territorial (EPT) sur le développement économique de la ZAC. Nous partons du recensement actualisé des entreprises existant à Ivry Confluences : leur volonté de rester ou non sur Ivry, leurs besoins, les nuisances qu’elles génèrent… A partir de ce recensement mais également des autres demandes d’implantation reçues par l’EPT, nous essayons de spatialiser les implantations adaptées dans la ZAC. Pour les activités de logistique les plus importantes, l’idée est de les relocaliser plutôt dans le quart sud-ouest de la ZAC vers le Carré Ivry et les voies ferrées (par exemple Axelis+ qui a de gros besoins mais qui ne crée pas d’importantes nuisances).

Un point sur les questions environnementales ?

Nous poussons fortement le projet sur les questions environnementales. La ville d’Ivry l’aborde en premier lieu par la question de la maîtrise des prix de sortie de l’immobilier. C’est une volonté politique très forte de donner la possibilité aux habitants de travailler et d’habiter au même endroit. C’est la première condition d’une vision de la ville durable, que nous partageons. L’écueil à éviter c’est que les promoteurs utilisent cette contrainte des prix de sortie maîtrisés pour tirer la qualité architecturale vers le bas et faire l’impasse sur les objectifs environnementaux.

Nous poursuivons donc l’ambition environnementale de la ville sur d’autres sujets, comme la pleine terre, la gestion de l’eau, la conservation de bâtiments existants et le réemploi des matériaux. Plutôt que de démolir, nous proposons de déconstruire : nous projetons de faire une plateforme du réemploi dans le sud de la ZAC vers la halle Witchitz. Elle nous permettra de disposer de matériaux issus des déconstructions qui pourront être réinjectés dans le projet, via l’aménagement des espaces publics et des espaces construits (béton, bordure en granit, bois, pavés, structures…).

Enfin, la question environnementale touche aussi et surtout à la question de la construction neuve. Sur ce sujet, nous souhaitons également être ambitieux. Avec Zefco, le bureau d’études environnement qui fait partie de notre équipe de maîtrise d’œuvre urbaine, nous poussons les promoteurs à construire avec un bilan carbone optimisé, nous encourageons l’utilisation de matériaux bio-sourcés, la construction bois. Nous demandons d’avoir le plus d’appartements traversants possible. Ces critères sont intégrés dans les cahiers de prescriptions architecturales et dans les fiches de lots.

Merci, Maxime Lefranc.

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